Titouan

 

Le jeune skipper devait ce prénom au vainqueur du premier Vendée-Globe, Titouan Lamazou, qui avait franchit la ligne d’arrivée le jour même de sa naissance, et dont sa maman était une fidèle supportrice. A l’instar de nombreux gamins du littoral, il apprit à naviguer sur cette populaire coque de noix qu’est l’Optimist, lors d’un stage de Voile Scolaire. Comme il s’y montrait particulièrement habile, plutôt que de l’inscrire au foot, ses parents l’orientèrent vers le Club Nautique le plus proche. 

 

A dix ans il courait ses premières régates. Cinq ans plus tard, il intégrait la section sport-études-voile du Lycée de Brest. Le bac en poche, il poursuivit ses études en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives. C’est à cette époque qu’il délaissa le dériveur pour apprendre la Course au Large comme équipier. Son caractère enjoué, son énergie et son assiduité, lui valurent bientôt d’être recherché par les plus fameux skippers. De fil en aiguille, il devint lui-même chef de bord et figura honorablement dans les courses régionales. La chance lui sourit lorsqu’un participant se blessa trois jours avant le départ de la Solitaire du Figaro. Ses sponsors lui confièrent le bateau.

 

 

Par le travers de la Presqu’île de Crozon, il filait sous spi, bâbord-amures, dans un petit Nordet de force 3, lorsqu’il entendit des vocalises. Amateur de musique classique, il reconnut une voix de soprano colorature. Il regarda dans toutes les directions pour voir d’où elle pouvait venir. Il n’y avait nul bateau à proximité. Au delà d’un mille, il apercevait seulement les voiles de trois de ses concurrents. La distance et l’orientation du vent rendaient impossible que les vocalises en provinssent. Peu à peu la voix se fit plus intense, comme si elle surgissait de son propre bateau. Ou plutôt de la surface des flots. Il mit sa main droite en visière pour scruter les alentours et vit sortir le torse nu d’une superbe baigneuse qui lui faisait signe d’approcher. Sans s’arrêter de vocaliser elle se lança dans un exercice de natation synchronisée à faire pâlir d’envie les meilleures émules de Muriel Hermine. A l’occasion d’une figure, le navigateur sidéré découvrit qu’elle était dotée d’une queue de poisson. 

 

Irresisiblement attiré, il plongea pour la rejoindre. Allait-il connaître le sort funeste des marins attirés par le chant des Sirènes ?

 

suite