Au Nigrum Cattus

 

Deux jours plus tard, vêtu d’une tunique blanche à galon rouge et de sandales en cuir fauve, il prenait le chemin du forum.  On était en aprilis de l’an cinquante avant Jésus-Christ, en milieu de matinée. La place avait des couleurs, des bruits et des parfums de souk moyen-oriental. Mais la vêture des marchands et des badauds donnait plutôt à Isidore l’illusion de figurer dans un péplum. 

 

Il dirigea ses pas vers les échopes des orfèvres. Les monnaies romaines étant de coûteuses pièces de collection dans le Paris du vingt-et-unième siècle, il avait préféré se munir de pastilles d’or qu’il pourrait monnayer sur place. Ce qu’il fit incontinent. La bourse emplie de sesterces il se mit en quête de l’hypothétique Nigrum Cattus.

 

La taverne existait bien. Mais à cette heure elle était déserte, seuls deux esclaves expurgeaient les lieux des vestiges de la nuit. Il s’enquit de l’existence éventuelle d’un certain Mercurocrum. 

 

(NB : Dans la version originale, les dialogues sont en latin. Mais pour le confort de lecture du plus grand nombre, j’ai demandé à un spécialiste de me les traduire en français.)

 

« Mercurocrum ? Ce simple optio centuriæ qui se fait passer pour un centurion ? On ne connait que lui. Depuis qu’il est rentré de la guerre des Gaules, il raconte à qui veut l’entendre sa bataille d’Alésia. Mais sa permission s’achève et sa centurie doit monter en Armorique. Il parait qu’une poignée de gaulois réactionnaires y mettrait en péril la Pax Romana. 

— Vous êtes esclave depuis toujours ?

— En aucun cas. Il y a deux ans j’étais pédagogue à Lugdunum. Mais j’ai répondu à l’appel de Vercingétorix et j’ai été fait prisonnier par les compagnons d’armes de ce Mercurocrum. 

— Je me disais aussi…

— Si vous voulez vraiment le voir — et l’entendre — revenez en fin de matinée, à l’heure de l’anethis. 

— ?

— C’est une boisson qui ouvre l’appétit.

— Bien sûr. Merci. A tout à l’heure. »

 

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